Comment fonctionnent les assurances?
Comment fonctionnent les assurances?

Article spécialisé

Comment fonctionnent les assurances?

A quoi servent les assurances?

La vie n'est pas faite que de bons moments, elle recèle aussi des risques. Ainsi, personne n’est à l’abri d’un accident ou d’une maladie grave. Et aussi dans le monde du travail, les erreurs sont inévitables: la perte d'une cargaison peut par exemple survenir pendant le transport. Même s’il est impossible de se prémunir totalement contre ces risques, se protéger contre les ▸dommages financiers qu’ils entraînent est tout à fait faisable. C’est ce type de protection que proposent les assurances.

Les assurances sont essentielles au bon fonctionnement d'une économie de marché moderne. Sans elles, de nombreuses transactions économiques, comme le transport de marchandises, seraient tout simplement irréalisables, car le risque d'une perte financière importante serait trop élevé.

La Suisse compte, au total, environ 190 compagnies d’assurances privées qui emploient environ 50 000 personnes (état 2022). Le secteur comprend les branches suivantes: l’assurance vie, l'assurance dommages, l'assurance-accidents, l’assurance-maladie et la réassurance.

Comment fonctionnent les assurances?

La souscription d'une assurance s'accompagne du paiement d'un montant – la ▸prime – à la compagnie d'assurances. En cas de ▸sinistre, la compagnie d'assurance indemnise le dommage financier en puisant dans les primes encaissées; en règle générale, la somme versée à la partie lésée ne peut toutefois dépasser un certain plafond convenu contractuellement. Afin de pouvoir proposer cette prestation, la compagnie d'assurance a dû conclure au préalable un grand nombre de contrats avec des particuliers et des entreprises. Comme seule une faible part des assurés subira effectivement un sinistre, le dommage financier est réparti entre de nombreux payeurs de primes (voir à ce sujet l'encadré «Loi des grands nombres»).

Ce principe, qui consiste à réunir les risques et à les assumer conjointement, s'appelle la «▸prise en charge collective des risques» (voir à ce sujet l'illustration ci-dessous).

Glossaire

Aléa moral

L'aléa moral (moral hazard en anglais) décrit le comportement des personnes assurées qui ont tendance à prendre plus de risques ou à se comporter de manière plus négligente parce qu'elles sont protégées des conséquences financières via l'assurance.

Dommage

Un dommage est un préjudice involontaire causé aux biens d'une personne.

Franchise

La franchise est le montant que la personne assurée doit payer de sa poche en cas de sinistre.

Prime

La prime (ou contribution à l'assurance) est la somme d'argent qu'une personne assurée verse régulièrement à la compagnie d'assurance afin de recevoir une compensation financière en cas de dommage.

Prise en charge collective des risques (principe de solidarité)

Avec le principe de prise en charge collective des risques, les risques sont partagés au sein d’un groupe donné. Tous les membres versent une somme d’argent dans une cagnotte. En cas de sinistre au sein du groupe, les frais occasionnés seront couverts par cette cagnotte.

Sélection adverse

Dans le contexte des assurances, la sélection adverse signifie que les personnes ayant un niveau élevé de risque ont plus tendance à s’assurer. Des primes uniformes rendent l'assurance attrayante pour ces personnes, tandis que les personnes présentant un faible risque se retirent du marché.

Sinistre

Un sinistre est un événement qui provoque un dommage.

Que peut-on assurer?

Comme mentionné précédemment, une assurance ne répare pas le dommage. Elle l'indemnise uniquement sur le plan financier. Ainsi, une assurance incendie n'empêchera pas un feu, mais elle protégera les assurés des pertes matérielles occasionnées par celui-ci.

Tous les types de dommages ne peuvent pas être assurés. Les conditions ci-après doivent être remplies pour que les assurances puissent proposer une couverture:

1. Le dommage assuré doit être clairement défini dans le contrat d’assurance.

Exemple: l'attaque du 11 septembre contre les tours jumelles du World Trade Center impliquant deux avions constitue-t-elle un ou deux attentats et l'assurance doit-elle accorder une ou deux couvertures?

2. La probabilité d’un événement doit pouvoir être déterminée d’une manière fiable (loi des grands nombres).

Il est dès lors extrêmement difficile de s’assurer contre des événements très rares, car leur probabilité ne peut guère être calculée (par exemple la chute d’une météorite). En outre, il est plus aisé pour une assurance de se trouver face à des cas où les événements arrivent indépendamment les uns des autres, autrement dit où la survenance d’un événement n’a pas d’incidence sur la probabilité qu’un autre événement se produise.

3. La personne assurée ne doit pas pouvoir influencer d’une manière décisive sur la survenance et l’importance d’un dommage (aléa moral).

Il n’existe, par exemple, aucune assurance garantissant la longévité d’un mariage, la prospérité d’une entreprise ou encore la réussite d’un examen.

4. Enfin, la fourniture de la prestation doit être économiquement viable pour l'assurance.

Aucune protection n'est en effet proposée lorsque le dommage ou le nombre de personnes concernées est trop faible (par exemple une assurance contre la rupture d'une corde sur une guitare). Si une personne est toutefois disposée à payer des primes très élevées pour couvrir un dommage important, elle peut se prémunir contre des risques complexes et très personnels, notamment sur le marché d'assurances de Lloyd's, où des célébrités assurent même des parties de leur corps (cordes vocales d'une chanteuse, mains d'un pianiste). Lorsque le dommage potentiel est particulièrement grand, la couverture d’assurance accordée est généralement restreinte (accident d’une centrale nucléaire, attaques terroristes, guerre, etc.).

De quoi dépend la prime d'assurance?

Il est possible d’acheter une couverture d'assurance comme n'importe quel autre bien. Le coût de cette couverture dépendra du niveau de protection souhaité: la prime sera d'autant plus importante que la prestation d'assurance en cas de sinistre est élevée, que la probabilité de sinistre est forte et que le nombre de preneurs d'assurance est faible. Il est par exemple plus risqué (et donc plus cher) pour un assureur de proposer une assurance hospitalisation complémentaire en division privée à une femme de 70 ans qu'à une femme de 25 ans, car il est nettement plus probable que la plus âgée des deux fasse valoir son droit à la prestation d’assurance (voir l’illustration à droite). Les tarifs des différents assureurs ont tendance à s'harmoniser si ces derniers sont soumis à la concurrence et à la transparence en matière de prestations: les assurances A et B proposent alors une prime similaire pour une prestation comparable.

Quand est-il opportun de s’assurer?

Lorsqu'une couverture d'assurance offre une prestation minime (par exemple une assurance contre le bris de glace), chacun doit se demander si cette couverture en vaut vraiment la peine pour lui. La probabilité de la survenance d’un sinistre étant élevée, la prime est en effet importante au regard du dommage. Une alternative pourrait être de verser de l'argent sur un compte bancaire ou postal, car l'épargne constitue également une assurance contre les risques. Elle présente l'avantage de couvrir des risques très différents sans que ceux-ci soient définis précisément au préalable (dans le cadre d’un contrat), comme dans le cas d'une assurance bris de glace.

Lorsque le dommage potentiel est important, l'épargne ne représente cependant pas une réelle alternative à la couverture d'assurance, par exemple à la couverture offerte par une assurance incendie (dans les cantons où elle n'est pas obligatoire). De tels sinistres ayant une faible probabilité, les primes d'assurance sont basses au regard des dommages. L’assurance-maladie offre également une couverture en cas de dommages importants. Les coûts découlant d’une maladie étant souvent trop élevés pour être couverts par l’épargne, il est obligatoire de contracter une assurance-maladie.

Pourquoi est-il problématique de demander la même prime pour assurer des risques différents?

Lorsqu'une compagnie d'assurance propose une prime unique pour une assurance voiture, il part du principe que tous les automobilistes représentent un risque similaire et qu’ils veulent éviter les accidents. Qu'en est-il toutefois si cette hypothèse est incorrecte?

Supposons que l'assurance vende à une personne ayant un style de conduite risqué une assurance voiture dont le tarif est calculé d’après la moyenne de tous les sinistres escomptés. Le preneur d'assurance réaliserait une bonne affaire. Pourquoi? Parce que, bien qu'il présente un risque de sinistre beaucoup plus élevé («mauvais» risque), il ne devrait s'acquitter que d'une prime moyenne. Si la compagnie d'assurances savait que la personne est imprudente et prend des risques au volant, la prime qu'elle devrait payer serait clairement supérieure à la moyenne.

A l'inverse, une prime moyenne n'est pas intéressante pour les personnes considérées comme de «bons» risques, car l'éventualité d'un sinistre est plus faible dans leur cas. Les automobilistes prudents pourraient dès lors être tentés de ne plus souscrire de couverture d'assurance auprès de cette assureur, ce qui augmenterait la part de «mauvais» risques dans le portefeuille de l'assureur.

Quelles sont les conséquences de cette égalité de traitement pour les assureurs?

Des primes calculées d'après la moyenne de tous les conducteurs ne permettent plus de couvrir les coûts des sinistres. Il faut alors augmenter les primes, ce qui fait fuir les «bons» risques. Conséquence: les primes progressent de nouveau. Cette évolution peut affecter la rentabilité de l'assurance voiture et inciter la compagnie d'assurance à abandonner ce produit.

Dans le jargon des assurances, ce processus au cours duquel les «bons» risques quittent progressivement le marché, sur lequel demeurent en priorité les «mauvais» risques, s'appelle la sélection adverse ou l'antisélection. Dans des cas extrêmes, la ▸sélection adverse peut mener à un effondrement total du marché.

Il est possible d’écarter la menace d’une sélection adverse par la détection et le classement des divers risques et donc par des primes et des prestations différenciées. Les assurances accordent, par exemple, des primes plus basses aux conducteurs qui n’ont pas d’accident pendant une longue période. L’inconvénient de cette méthode: cette différenciation concerne tous les assurés, et non pas uniquement ceux qui prennent des risques. Cela peut être perçu comme injuste, car tous les jeunes automobilistes n'ont pas une conduite risquée.

Comment les assurances influencent-elles sur le comportement des assurés?

La conclusion d'une assurance peut entraîner un relâchement des efforts visant à éviter un sinistre. Ce phénomène s'appelle ▸aléa moral, ou moral hazard en anglais. Une couverture d'assurance peut donc (mais ne doit pas forcément) induire un changement de comportement.

Deux exemples:

  • Un conducteur bénéficiant d'une assurance casco complète conduit plus vite et moins prudemment, car le dommage est couvert en cas d'accident.
  • Un preneur d’assurance a un accident de voiture et en profite pour faire réparer, aux frais de l’assurance, des dommages qu’il avait causés à son véhicule avant l’accident (fraude à l’assurance).

Quelles sont les conséquences de l'aléa moral sur les compagnies d’assurance?

Etant donné que certains assurés prennent davantage de risques, un plus grand nombre de sinistres est déclaré. Les coûts augmentent et, en conséquence, éventuellement les primes. L'assurance devient dès lors moins attrayante pour les personnes prudentes; certaines résilieront leur contrat ou changeront de compagnie. Par conséquent, les coûts de la compagnie d'assurance augmentent et les primes connaissent une nouvelle progression. Si le produit concerné n'est plus rentable, la compagnie d'assurance se demandera s’il est encore judicieux de le proposer.

L'introduction d'une ▸franchise peut contribuer à combattre le problème de l'aléa moral. Les parties conviennent contractuellement qu'un montant précis (pourcentage du montant du dommage ou montant fixe en francs) est à la charge de l'assuré pour chaque sinistre. Plus la franchise est élevée, moins l'assuré est tenté de prendre des risques importants. Inconvénient: seule une partie du dommage est assurable.

La compagnie d'assurance peut également atténuer les comportements risqués grâce à un système de bonus/malus: les assurés qui subissent un dommage doivent payer des primes plus élevées. En revanche, ceux qui n'ont subi aucun sinistre bénéficient d'une réduction de prime pour la période suivante. Ce système de bonus/malus est par exemple utilisé dans l'assurance responsabilité civile des véhicules.

Comment les assureurs se prémunissent-ils?

En regroupant les risques, l’assureur peut les répartir sur un grand nombre de personnes (voir à ce sujet le graphique «Principe de la prise en charge collective des risques, aussi nommé principe de solidarité»). Il peut cependant arriver qu'un événement, tel qu'une catastrophe naturelle ou une pandémie, affecte beaucoup de personnes à la fois. C'est pourquoi les compagnies d'assurance ventilent aussi leurs risques sur une longue période et constituent des réserves lors des années favorables, qui comptent moins de sinistres, afin de faire face aux périodes occasionnant des coûts élevés.

Même en procédant de la sorte, on ne peut toutefois totalement exclure qu'un sinistre donné affiche une ampleur telle que la compagnie d'assurance ne puisse plus en supporter seul les conséquences financières. C’est là qu’interviennent les réassureurs, qui couvrent l'assureur contre le risque résiduel.

 

 

Loi des grands nombres

Supposons qu’une assurance ménage ait 10 000 clients en portefeuille et que la probabilité d’un incendie soit identique pour tous et s’élève à 1%. En d’autres termes, 100 personnes en moyenne subiront des dommages financiers à la suite d'un incendie. Si ces 10 000 clients paient chacun une prime d'assurance annuelle de 500 francs, la compagnie d'assurance encaisse 5 millions de francs chaque année. Sans tenir compte des frais administratifs, ce montant suffit pour verser une indemnisation de 50 000 francs à toutes les parties lésées. Mais qu'advient-il si l'on enregistre soudain 120 sinistres au lieu de 100? Fort heureusement, une telle situation est extrêmement improbable, car les assurances s'appuient sur une règle appelée «loi des grands nombres». Celle-ci leur permet d'évaluer assez précisément le nombre des sinistres futurs. Plus il y a d'assurés, plus la fréquence à laquelle survient un sinistre donné (par exemple un incendie) se rapproche de la moyenne observée à long terme (ou de la moyenne théorique).

Assurances sociales: protection contre les situations financières difficiles

Les assurances sociales complètent les autres assurances. Il s'agit notamment de l'assurance-vieillesse et survivants (AVS), de l'assurance contre les accidents professionnels, de l'assurance-chômage (AC), de l'assurance-invalidité (AI), de l'assurance maternité et de l'assurance obligatoire des soins (AOS). Elles entendent octroyer une protection contre les situations financières difficiles.

Les assurances sociales forment une communauté solidaire dans laquelle les plus jeunes aident par exemple les personnes âgées au moyen de leurs cotisations (AVS) ou dans laquelle les travailleurs soutiennent les chômeurs (AC).

Les assurances sociales sont obligatoires. Si elles étaient facultatives, elles ne seraient pas conclues par tous étant donné qu'elles impliquent une redistribution des cotisations de certains assurés en faveur d'autres (principe de solidarité). Par exemple, les personnes au bénéfice d’une solide formation sont des contributeurs nets au regard de l'assurance-chômage et celles qui gagnent bien leur vie le sont au regard de l'AVS, assurance pour laquelle les cotisations dépendent du salaire et ne sont pas plafonnées, alors que les rentes de vieillesse, elles, ne peuvent dépasser un certain montant.